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mardi 12 octobre 2010

L'État et le monopole de l'exercice de la violence légitime

Vous avez sans doute suivi l'histoire de René Galiner, ce vieil homme qui a tiré sur deux gamines en train de le voler, avant d'être jeté en prison où il est toujours à l'heure qu'il est. Je suis tombé récemment sur le texte des motifs de l'arrêt prononçant la reconduction de sa mise en détention, dont je vous livre un extrait qui m'a semblé particulièrement significatif :
Seule l’importance symbolique attachée à la mesure de détention provisoire est de nature à ramener l’ordre et à rappeler que l’exercice de la violence légale est le monopole de l’État républicain.
 Je n'ai pas l'intention de commenter la décision de la chambre de l'instruction, n'étant pas suffisamment au fait de cette affaire pour émettre une quelconque opinion à ce sujet, encore qu'il me paraisse pour le moins étonnant, quand bien même cette décision serait-elle justifiée, qu'on laisse cet homme en prison quand, dans le même temps, on remet en liberté des criminels avérés. Ce qui m'intéresse, c'est plutôt le motif invoqué pour la justifier, qui me paraît tout à fait représentatif de la démission de l'État. On voit en effet un organe de justice, émanation de l'État, expliquer que le seul moyen d'assurer le monopole de celui-ci sur l'exercice de la violence légitime, c'est qu'il se refuse à l'exercer. Outre le caractère paradoxal de cette explication, pour ne pas dire absurde, les magistrats qui ont pris cette décision ne craignent pas même d'expliquer ouvertement que c'est par crainte de la réaction de l'une des parties qu'ils ont décidé la reconduction de la mise en détention du prévenu.

C'est un aveu terrible et le fait qu'on puisse l'exprimer officiellement sans que cela n'étonne personne dit beaucoup sur l'état de déliquescence intellectuelle et morale dans lequel nous sommes plongés. L'État ne peut d'ailleurs pas se réfugier derrière l'indépendance de la justice, comme l'UMP s'efforce de le faire depuis quelques jours, puisqu'en l'occurrence un membre du parquet siège à la chambre d'instruction et qu'il est difficile d'imaginer que cette décision n'émane pas de lui. Il me semble pourtant qu'il y a un moyen beaucoup plus sûr de rappeler que l'État détient le monopole de l'exercice de la violence légitime, c'est tout simplement qu'il l'exerce et qu'il brise les résistances de ceux qui le lui contestent. Croyez-vous que Richelieu aurait finassé avec des gens qui mettent en cause l'autorité de l'État ? À l'heure qu'il est, s'ils avaient osé se révolter, il y aurait déjà un gitan pendu tous les dix mètres dans la ville qu'ils ont mise à sac, ce qui passerait l'envie à tous les autres de les imiter. La même chose vaut pour les banlieues (car, il ne faut pas l'oublier, ces histoires de Roms sont anecdotiques au regard du véritable problème) : on voudrait nous faire croire que le problème est très difficile à régler et que cela prendra énormément de temps. Mais que l'État cesse de se dérober à ses responsabilités et vous verrez que le problème, prétendument impossible à régler, aura disparu en l'espace de quelques mois. Le véritable problème est que depuis trente ans, les gens à la tête de l'État ne croient plus à la légitimité de l'usage de la violence pour faire respecter son autorité. C'est donc avant tout un problème idéologique, qui tient à ce que la notion d'autorité elle-même n'a plus aucun crédit, du moins dans l'esprit des membres de la classe dirigeante, qui ont érigé la veulerie en politique d'État. Fort heureusement, ce n'est pas le cas dans le peuple, ce qui laisse espérer qu'un jour on revienne à des moeurs politiques plus saines.

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